Abandons créances

Dans un arrêt en date du 7 février 2018 (SARL France Frais), le Conseil d’Etat est venu préciser les modalités d’appréciation du caractère commercial d’un abandon de créance entre une filiale et sa holding. L’enjeu étant constitué par la déductibilité subséquente de ladite aide du résultat imposable de la société qui l’a consentie.

Pour rappel :

En matière de déductibilité des abandons de créance, la règle n’est pas nouvelle :

  • Les aides entre sociétés sont déductibles à condition qu’elles présentent un « caractère commercial » et qu’elles soient consenties dans le cadre d’une « gestion normale », dans l’intérêt de la société aidante
  • A contrario, ne sont pas déductibles les aides à « caractère financier », exception faite des aides consenties aux sociétés en phase de procédure collective et de conciliation, qui peuvent bénéficier d’une déductibilité limitée
  • S’agissant des aides mixtes, combinant caractère commercial et financier, doctrine et jurisprudence regardent ensemble dans la même direction : traditionnellement l’accessoire suit le principal. La qualification commerciale ou financière de l’aide est donc relative aux motifs prééminents ayant fondé l’accord de l’aide en cause

Dans l’affaire SARL France Frais,

une société holding a procédé à des abandons de créances au profit de filiales dont elle détenait la quasi-totalité du capital et qui réalisaient pour elle des prestations de référencement.Leur attribuant un caractère financier, l’administration fiscale ne les admet pas en déduction au motif que les relations entretenues par la holding et ses filiales relèveraient du simple courtage.La société se voit ensuite déboutée par les juges du fond qui viennent ajouter que les risques encourus par la holding en cas de défaillances desdites filiales n’étaient pas assez conséquents pour justifier la déductibilité des aides consenties.

Pourtant, le Conseil d’Etat infirme par la suite cette décision en admettant une déductibilité totale des abandons litigieux. Il relève à cette fin que :

  1. Les filiales négociaient des conditions tarifaires avec les fournisseurs du groupe, constituant ainsi une prestation de référencement à caractère commercial
  2. Ladite activité de référencement constitue une part prépondérante du chiffre d’affaire de la holding (notamment au vu des dividendes perçus de ces filiales)
  3. La défaillance potentielle des filiales aidées aurait donc pu sérieusement amenuiser les résultats de la holding

Dans cette décision, le Conseil d’Etat réaffirme donc une appréciation in concreto du caractère commercial des aides entre sociétés, fondée sur 3 critères :

  • Nature des rapports entre la holding et la filiale
  • Niveau de profitabilité de la relation commerciale pour la mère
  • Réel intérêt pour la mère de l’aide consentie à la filiale